Histoire du parc
Après l’indépendance de 1830, Bruxelles est devenue une ville en pleine expansion. Le Bois de la Cambre n’était alors pas aménagé, loin et difficile d’accès. Deux particuliers, Jean-Philippe De Joncker et Jean-Baptiste Jourdan, créèrent en 1838 le quartier Louise, du nom de la reine. Six ans plus tard, ils proposèrent d’aménager une promenade publique reliant le boulevard principal du quartier directement au Bois de la Cambre, afin de le rendre plus accessible. Le gouvernement confia l’exécution des travaux à la ville de Bruxelles et dénomma la promenade l’avenue Louise.
En 1822, le roi des Pays-Bas, Guillaume Ier, fit apport de la forêt de Soignes à la Société Générale. Le domaine fut divisé en triages ou cantons, et le futur Bois de la Cambre fut dénommé triage de Vleurgat, remplacé plus tard par « Bois de la Cambre ». En 1843, la Société Générale céda la forêt à l’État. L’accès y était long et peu commode et le bois était alors peu fréquenté. L’avenue Louise permit de résoudre le premier problème, mais il existait une nécessité d’approprier la forêt, de la transformer fortement.
En 1861, lors de la construction de l’avenue Louise, la Ville obtenu le Bois de la Cambre, contenant plus de 106 hectares, pour le transformer, à ses frais, en parc public.
L'aménagement du Bois de la Cambre
Plusieurs architectes de jardins envoyèrent à la Ville un projet d’aménagement du bois. Les consignes étaient de réduire les dépenses au maximum et de garder au plus possible les arbres et les taillis. C’est le projet d’aménagement de type paysager d’Edouard Keilig qui fut retenu et adopté en 1862.
Pour mener à bien ses travaux, Keilig reçu de la Ville un forfait de 30 000 francs. Il commença le 15 mars 1862. Son projet initial fut quelque peu modifié afin de protéger au mieux les arbres. Une extension fut faite, portant la superficie du bois à 122 hectares, 33 ares, 81 centiares. Les anciennes voies furent presque toutes supprimées, au profit de nouvelles sillonnant entre les arbres.
Le site présente différents inconvénients (une petite superficie, une configuration allongée et des abords peu attractifs) mais également des avantages (la forêt et le relief). Keilig s’efforça de remédier aux premiers et de tirer profit des seconds. Il voulut apporter une variété dans le bois, en offrant divers points de vue et différents espaces. Le style paysager choisi permet au bois de garder son caractère naturel. Keilig voulait avant tout tirer parti des dispositions naturelles et imiter la nature, comme par exemple le pont artificiel imitant des rochers.
Le bois est divisé en deux parties, chacune disposant d’un centre d’intérêt : un pont en pierre pour l’une, se voulant le plus naturel possible, dont les travaux furent terminés en 1867 ; un lac pour l’autre, avec une île en son centre.
En 1870, la Ville lança un appel d’offre pour établir des établissements récréatifs dans le bois. Elle retint quatre projets, conçus dans un goût rustique et dans un but de délassement. Il s’agit de la Laiterie, du Gymnase et du Chalet Robinson dans les années 1870 et du Chalet des Rossignols en 1892. On pouvait trouver à la Laiterie un restaurant, des pâtisseries et glaces, du thé, café et alcool et des cigares de la Havane. Elle fut détruite par un incendie en 1973 sans jamais être reconstruite. Le Chalet Robinson, bâtit sur l’île, brûla également en 1896. Au fil du temps, la Ville reprit les quatre établissements.
La vie au bois
Le succès du Bois de la Cambre dépassa les espérances. Ce succès fut soutenu entre-autre par l’apparition du premier tramway du pays en 1869. On y voyait essentiellement des personnes aisées, les classes populaires se trouvant plus loin du bois.
La reine aimait beaucoup s’y balader en calèche, d’abord avec son mari, ensuite avec ses enfants. Cyclistes, cavaliers et promeneurs en belle toilette y circulaient abondamment. Afin de prévenir les dégâts causés par l’affluence au bois, la Ville clôtura les massifs et une partie des pelouses à partir de 1884.
L’équitation fut favorisée lorsque Keilig traça un parcours de piste cavalière pour atteindre le bois ainsi qu’une piste d’obstacle. Un hippodrome vu également le jour en 1875 derrière le bois, dans la forêt de Soignes.
Le cyclisme était également très pratiqué dans le Bois de la Cambre. Un vélodrome fut inauguré en 1893.
Avec l’apparition de l’automobile, le bourgmestre limita en 1906 la circulation des autos et motocyclettes à une partie du réseau carrossable.
Le Bois de la Cambre accueillait également divers événements festifs, comme le cortège du Longchamps (un défilé d’attelages, ensuite appelé Longchamps fleuri), la fête nationale ou des courses de charrettes. En hiver, tout le monde se rassemblait pour aller patiner sur le lac.
« De façon générale, l’aménagement du Bois de la Cambre et la création de l’avenue Louise constituent des exemples majeurs de l’urbanisme bruxellois au XIXe siècle, qui visait à assainir, rationaliser et étendre la cité tout en l’embellissant. »
Le bois resta dans l’ensemble relativement le même. Toutefois, lors de la seconde guerre mondiale, de nombreux arbres de tailles moyenne furent coupés clandestinement. En 1966, une commission d’expert fut également rassemblée pour évaluer la dangerosité de certains arbres pour la circulation automobile. La Ville appliqua alors un programme de régénération progressive des arbres. En 1976, elle interdit également la circulation automobile dans la majeure partie du bois les samedis et dimanches de belle période. La même année, le bois fut classé site à sauvegarder, interdisant de modifier l’aspect du terrain ou de la végétation.
L'architecte paysagiste Keilig
Edouard Keilig est né en 1827 à Roedgen, en Allemagne. Suite à une maladie des yeux, Keilig renonce à l’université et se tourne vers des études d’horticulture et plus particulièrement l’architecture des jardins. Il arriva en Belgique en 1853 et débuta chez le célèbre Jean Linden. Le duc du Brabant, futur Léopold II, fit appel à ses services à plusieurs reprises. Il fut ensuite sélectionné pour l’aménagement du Bois de la Cambre, où son talent fut révélé au grand public et où il acquit sa renommée.
Lorsqu’il obtint la naturalisation belge en 1868, la Ville le nomma inspecteur des plantations.
Il mourut à Bruxelles en 1895.